dimanche 7 septembre 2014
Le lieutenant-colonel Guichard
La police impériale, toujours soucieuse d'informer Napoléon des évènements se passant dans l'Empire, note l'arrivée, le 29 décembre 1813, à Paris, où il doit rester deux jours, d'un lieutenant-colonel Guichard, commandant les cuirassiers de la garde royale de Naples.
Les renseignements sont parcellaires quant à cet officier français passé au service du maréchal Murat. Selon des sources italiennes étudiées par l'historien Yves Martin, Guichard était capitaine au 4e escadron du régiment des chevaux-légers de la garde royale napolitaine, de 1810 à 1813. Titulaire de l'ordre des Deux-Siciles, promu chef d'escadron, il passe dans les cuirassiers de la garde comme major (maggiore). Naturalisé napolitain, parmi 196 compatriotes, par décret du 20 janvier 1815, il démissionne du service du royaume lorsque lui parvient, le 4 mars 1815, l'annonce du retour de Napoléon en Provence, ce qui motive son départ pour la France.
Où est né ce major Guichard ? Longtemps, cette question est restée sans réponse. Aujourd'hui, nous sommes en mesure de préciser qu'il s'agit bien, comme nous le pensions sans preuve formelle, de Joseph Guichard, né le 27 avril 1777 à Montigny-le-Roi (Haute-Marne), fils de Jean, manouvrier, et de Marguerite Noël. Lorsqu'en 1818, sa fille Joséphine épouse, à Montigny, le lieutenant-colonel François Chameroy, Guichard est en effet qualifié de lieutenant-colonel de cavalerie et d'officier (sic) de la Légion d'honneur (malheureusement, l'homme n'est pas recensé par la base Léonore des Archives nationales, source essentielle pour connaître le parcours de militaires).
Pour reconstituer la carrière de Joseph Guichard, il faut nous en remettre à de rares sources. Notons d'abord qu'il est né la même année que son gendre : en 1777. Mais si Chameroy est entré en service, parmi les conscrits de cette classe, au sein du 1er bataillon auxiliaire de la Haute-Marne (versé en partie dans la 101e demi-brigade d'infanterie de ligne), Guichard n'apparaît pas sur le contrôle d'effectifs de ce bataillon. En fait, à la même époque, il occupe, à Metz, où il a épousé une Lorraine, Anne Chevalier, la fonction de conducteur en chef des charrois. Nous savons même qu'âgé seulement de 14 ans, il s'est inscrit, en juin 1791, devant la municipalité de sa commune, parmi les hommes volontaires pour défendre la patrie, avant de se rétracter le lendemain ! En 1802, alors que son épouse, toujours à Metz, met au monde sa fille, Joseph Guichard est qualifié de marchand de chevaux dans la cité. Avant de reprendre du service, avant 1810, dans la cavalerie napolitaine, jusqu'à atteindre le grade de major. S'il est localisé le 29 décembre 1813 à Paris, c'est peut-être parce que le même jour, décède à Montigny sa mère, dont il a pu être informé de la disparition prochaine.
Durant les Cent-Jours, Guichard revient donc en Haute-Marne. A partir du 2 mai 1815, il se préoccupe d'acheter une maison et des terres, aussi bien à Montigny-le-Roi qu'à Epinant. Quelques jours plus tard, il se porte volontaire pour organiser et commander, comme major, la cavalerie du corps-franc de la Haute-Marne. Avec ses hommes, il opère aux confins des Vosges.
Totalisant, au 1er juillet 1818, quinze ans, dix mois et 22 jours de service, le Bassignot cessera officiellement sa carrière le 9 août 1832. En demi-solde au moment du décès de son épouse, en 1831, il décède dans sa ville natale en 1839, au domicile de son gendre.
Il est à noter que Joseph Guichard avait également un frère sous les armes : Pierre, né à Montigny en 1771. Entré en service en mars 1791, présent à Metz au moment du mariage de son cadet, il sert jusqu'à la Restauration au 1er bataillon puis au 2e bataillon bis du train d'artillerie. Maréchal-des-logis-chef, rappelé le 29 avril 1815 durant les Cent-Jours pour le 4e bataillon bis du train d'artillerie, il sera médaillé de Sainte-Hélène en 1857 à Varennes-sur-Amance.
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