mardi 30 septembre 2008

Le général Rignoux, gouverneur de Séville

Antoine Rignoux est un pur « flûteau » (le surnom des habitants de Wassy). Il naît dans la cité chère à Marie Stuart le 17 février 1771, au foyer de Nicolas-Antoine Rignoux, boulanger, et de Marie Pissot. La même année, d’ailleurs, que son compatriote Jean-Marie Defrance.

D’abord séminariste selon certaines sources, il s’engage le 25 avril 1791 au 79e régiment d’infanterie, l’ancien régiment de Boulonnais alors en garnison à Strasbourg, et bientôt affecté à l’armée des Alpes. Un corps qu’il quitte pour le Bataillon de chasseurs des Hautes-Alpes formé en avril 1793, dont le chef en titre est Kellermann fils et où il est élu sergent-major le 16 juillet 1793, puis capitaine le 25 novembre. Il a 22 ans.

1794 est l’année du premier amalgame des anciennes troupes royales et des volontaires nationaux. Le bataillon intègre la 3e demi-brigade d’infanterie légère le 21 mars. Avec cette unité, le capitaine Rignoux prend part à l’illustre campagne d’Italie du général Bonaparte. C’est à l’occasion des combats de Salo qu’il est fait prisonnier le 29 juillet 1796. Libéré après échange, il est de retour le 21 décembre, quelques semaines avant le deuxième amalgame : la 3e est versée dans la 11e demi-brigade d’infanterie légère, toujours à l’armée d’Italie (au sein de la 6e division du général Rey). Capitaine de carabiniers, Rignoux est blessé le 20 mars 1797 d’un coup de feu au pied droit, dans le Tyrol. Cette blessure est évoquée dans les « Mémoires pour servir à l’histoire de France sous le règne de Napoléon » (1830), dans la relation du combat du 29 ventôse an IV dit de Coronna sur Saint-Michel : « Le citoyen Rignoux, capitaine, autre officier de mérite, fut aussi blessé, mais légèrement ; il fut quand même hors de combat, privant pour l’instant ses braves soldats d’un officier éclairé digne d’eux… »

Toujours sous Bonaparte, le Wasseyen est ensuite employé le 7 avril 1798 à l’état-major de l’armée d’Orient qui s’en va débarquer en Egypte. C’est là que le 25 juillet 1800, il est nommé aide de camp du général Belliard.

Après cette campagne, Rignoux est promu, à 32 ans, le 26 février 1803, chef de bataillon à la suite au sein de la 76e demi-brigade d’infanterie de ligne. Il en commande le 3e bataillon. Avec ce corps (devenu 76e régiment d'infanterie de ligne), le Haut-Marnais sert à l’armée du Hanovre (1803-1804), à l’armée des Côtes de l’Océan (1805), et à la Grande-Armée (1805-1807). Le régiment, commandé par le colonel Faure-Lajonquière, se bat à Ulm, à Iéna. A noter que dans sa marche vers l’Est, le 76e est passé par Saint-Dizier…

Après la bataille d’Eylau, Rignoux est nommé colonel du 103e de ligne, le 26 février 1807, succédant au colonel Taupin, qui vient d’être promu général de brigade. Parmi ses officiers, notamment, un Haut-Marnais : le sous-lieutenant Nicolas-Marie Guyardin, de Langres (un mémorialiste, le sergent François Lavaux, de Rivière-les-Fosses, et sans doute un parent, le sergent Marc Rignoux, de Saint-Dizier, figurent parmi les sous-officiers). 1808 marque un tournant dans la carrière de ce colonel de 37 ans : il est affecté en Espagne. Il y servira jusqu’en 1813…

Au cours du trajet, à l’automne 1808, son passage dans sa ville natale fait l’objet d’une réception et d’un compte rendu dans Le Journal de la Haute-Marne…

Le 103e est de la bataille d’Ocana (18 novembre 1809), au sein de la division Gazan du 5e corps. Officier de la Légion d’honneur le 17 décembre 1809, baron de l’Empire le 31 janvier 1810, toujours colonel du 103e, Rignoux se distingue surtout lors du premier siège de Badajoz. Le 19 mai 1811, il est promu général de brigade au sein de l’armée du Midi. On le retrouve le 9 août 1811 au combat contre la division Quadra sur le Rio Guadelentis.

Puis à la tête d’une brigade de la division Godinot, Rignoux se bat, le 12 septembre 1811, avec le 4e régiment polonais, contre le fameux général espagnol Ballesteros. Il s’empare de 5 à 600 hommes « et les fait passer par les armes », signale « Le Moniteur » de l’époque. Au total, Rignoux aurait causé plus de 1 000 tués dans les rangs ennemis, au prix de dix tués et 25 blessés. Puis il se porte sur Ximena avec 1 200 hommes, repoussant encore un assaut des Espagnols au prix de douze tués, 25 blessés, 25 prisonniers dont le chef de corps polonais.

C’est au cours de l’expédition dite du camp de Saint-Roch (non loin de Gibraltar), le 13 octobre 1811, que le général Rignoux a son œil gauche crevé. Devant Ubrique, par une balle, selon le pharmacien Blaze.

Le 7 décembre 1812, le maréchal Soult lui confie le gouvernement de Séville. Lors de la funeste journée de Vitoria, le 21 juin 1813, il commande une brigade de la division Vilatte composée du 27e léger et du 63e de ligne. Un mois plus tard, lors de l’évacuation d’Espagne, il est à nouveau blessé, le 25 juillet 1813, au col de Maya : sa cuisse est fracturée. Commandant de la Légion d’honneur le 25 novembre 1813, on ne trouve plus dès lors trace d’un commandement actif.

Sous la Restauration, il est fait chevalier de Saint-Louis, le 24 août 1814, puis mis en non activité le 1er septembre. Durant les Cent-Jours, Rignoux est nommé chef d’état-major du 8e corps d’observation (à Bayonne) le 25 avril 1815. A l’issue, le 1er août, il est définitivement en non activité.
Retraité, le Haut-Marnais se retire à Villenave-d’Ornon, dans la Gironde. Il y décède le 5 septembre 1832, à l’âge de 63 ans.