samedi 11 août 2012

Derniers légionnaires de l'Empire

Le 3 juillet 1815, depuis son quartier-général de Pont-d'Ain, le maréchal Suchet, duc d'Albuféra, commandant de l'armée des Alpes, a accordé à plusieurs de ses combattants le droit de porter le ruban de la Légion d'honneur, en attendant la délivrance de leur brevet. Délivrance qui ne viendra jamais (abdication de Napoléon oblige), du moins pas avant que la page de la Restauration ne soit tournée. Pour le seul 14e régiment d'infanterie de ligne, qui a accueilli dans ses rangs quelque 2 300 conscrits haut-marnais sous l'Empire, ce sont 24 officiers, 17 sous-officiers et six hommes de troupe qui ont bénéficié de ce privilège, parmi lesquels au moins huit Haut-Marnais, apparaissant donc parmi les derniers légionnaires de l'Empire. Ils se sont distingués les 15 et 28 juin 1815 lors des combats savoyards de Tournon et de L'Hôpital-Sous-Conflans (aujourd'hui Albertville), face aux Piémontais et Autrichiens. Citons-les : les lieutenants Nicolas Royer (né à Chaumont en 1787, chevalier en 1832), Blaise Décot (né à Chalvraines en 1781, blessé le 28 juin 1815), les sous-lieutenants Nicolas Arnout (né à Rançonnières en 1782), Joseph Guyonnet (né en 1790, de Graffigny, canton de Bourmont) et Claude Ignard (de Langres). Parmi les sous-officiers, Jean-Claude Herbin, né en 1787 à Bailly-aux-Forges (canton de Wassy), a été incorporé en 1807. Caporal en 1808, sergent en décembre 1813, il a servi de 1808 à 1814 en Espagne. Licencié le 16 septembre 1815, retiré à Vitry-le-François (Marne), il ne sera fait officiellement chevalier de la Légion d'honneur qu'en 1838. Sergent également, Joseph-Denis Martin, né à Breuvannes-en-Bassigny (canton de Clefmont) en 1783, en service en l’an XIII, a lui aussi été promu par Suchet le 3 juillet 1815, et ne recevra sa décoration qu'en 1832, sous Louis-Philippe. En revanche, dans la liste des membres de cette promotion indiquée par le commandant Dupré (« Les Fastes du 14e de ligne »), le sergent-major Etienne Henry, de Vicq, est en fait déjà légionnaire depuis le 27 février 1815, donc durant la Première Restauration. Mais son dossier personnel précisera que le 28 juin, « il fut un des premiers à aborder l'ennemi », justifiant ainsi sa place parmi les braves de cette journée victorieuse (dix jours après Waterloo...).