lundi 30 décembre 2013

Le 22e de ligne et la Haute-Marne

Le 22e de ligne a été particulièrement meurtri le 22 juillet 1812 lors de la bataille des Arapiles.

C'est durant le Directoire, en 1798, que la conscription, faisant suite à l'engagement volontaire et à la réquisition sous la Révolution, a été instituée, par la loi Jourdan-Delbrel. Les premiers Haut-Marnais touchés par cette nouvelle formule d'incorporation sont nés en 1777 et 1778. 

Ce sont pourtant les plus jeunes qui sont les premiers à entrer en service. Ils sont incorporés à partir du 8 frimaire de l'an VII de la République (28 novembre 1798) dans la 22e demi-brigade d'infanterie de ligne du chef de brigade Schreiber, qui sert la même année en Allemagne, puis en l'an VIII et en l'an IX en Hollande et en Italie, notamment à Marengo. Sous l'Empire, le 22e de ligne se battra à Heilsberg et en Espagne, particulièrement aux Arapiles. Quel était l'effectif de ce contingent ? Les documents font défaut pour répondre précisément à cette question. Mais nous savons qu'en 1803, année où la demi-brigade devient régiment, servent encore, au sein de ce corps, 119 fantassins haut-marnais entrés en service à partir du 11 frimaire (1er décembre). 
 Un chiffre révélateur : au moins 29 de ces conscrits sont devenus officiers. 
. les capitaines Charles Bazard, d'Hoéricourt, Nicolas Boisselier, de Chatoillenot, François Gaudel, d'Hâcourt, Louis Haumécourt, de Bourbonne-les-Bains, François Larchez, de Chaumont (tué en Saxe en 1813), Joachim Larribe, de Bourbonne (prisonnier en 1812), Germain Minot, de Poinsenot, François Pariselle, de Poinson-lès-Fayl, François Prudent, de Fayl-Billot, Joseph Richer, de Dommarien (blessé en Espagne en 1812), soit dix capitaines ; 
 . les lieutenants et sous-lieutenants Louis-Paul Barbaran, de Wassy, Armand Cercey, de Rennepont (blessé aux Arapiles), François-Nicolas Henry, de Longchamp-lès-Millières (blessé en Espagne), Jacques-Mammès Guidel, de Montsaugeon, Pierre Gervaisot, d'Eclaron (blessé aux Arapiles), Nicolas Giraux, de Larivière-sur-Apance, Claude Gobert, de Chamouilley, Philibert Laurent, de Brottes, Jean-Remy Martin, de Ceffonds, Pierre Mennetrier, de Bourbonne, Pierre Mercier, de Praslay (blessé en Belgique), Remy Michelot, de Pautaines, Henry Mignon, d'Andelot, Rémi Philippe, de Nomécourt, François Ragot, de Baudrecourt, Nicolas Rigollot, de Châteauvillain (blessé en Belgique), Nicolas Simon, de Doulaincourt (tué à Saint-Sébastien), Claude Simonnot, de Biesles (blessé à Wurschen), Simon Truchot, de Choilley... Soit 19 officiers. Sans oublier Charles Frossard, de Saint-Urbain, passé par la 22e, futur capitaine de la Garde impériale. 
 A noter que le 22e de ligne a été particulièrement meurtri le 22 juillet 1812, lors de la bataille des Arapiles (également fatale aux conscrits de 1777 incorporés dans le 101e de ligne). Ainsi, ce jour-là, ont été faits prisonniers les Haut-Marnais François Dimet (Chaumont), Jean-Baptiste Demange (Poissons), le sergent-major Jean-Baptiste Caussin (Prez-sous-Lafauche), le sergent-major Simon Blanchard, le sergent François Brisebard, le sergent Nicolas Broussard (Sommevoire), Charles Didier, Jean-Baptiste Horiot, Jacques Lahalle (Donjeux), Nicolas Pingot (Saint-Dizier), le sergent Pierre Sarrey (Roches-sur-Rognon), le sergent Joseph Thirion... 
 A noter encore que le 22e de ligne (brigade Dupeyroux, 10e division Habert, 3e corps) se battra en Belgique en juin 1815. Il était sous les ordres du colonel Fantin des Odoards, assisté du major Gaultier, et ses trois bataillons confiés respectivement aux commandants André-Félix Germain (né en 1772 dans la Drôme), touché par un coup de feu au bras droit à Wawre, Sounié (ou Sommié) et l'Ardennais Brice-Narcisse Hotte. Selon Martinien, 17 officiers ont été blessés le 16 juin à Ligny, un tué et six blessés (dont Germain) le 18 juin à Wawre, un tué et deux blessés dans un combat route de Wawre le lendemain. Parmi les officiers haut-marnais ayant pris part à la Campagne, citons le capitaine Pariselle, de Poinson-lès-Fayl, et le lieutenant Ragot, de Baudrecourt, blessés à Ligny, le lieutenant Rigollot, de Châteauvillain, et le sous-lieutenant Mercier, de Praslay, blessés à Wawre, les capitaines Bazard, et peut-être les capitaines Gaudel et Haumécourt.

lundi 21 octobre 2013

Therrin, chirurgien de la Garde, médecin bourbonnais

Méconnu, le Dr Therrin aura vécu plus de 40 ans à Bourbonne-les-Bains, où il a fini ses jours. Comme ses compatriotes Zinck (de Dommartin-le-Saint-Père) et Champion (de Bourmont), ce praticien distingué avait servi comme chirurgien dans l'illustre Garde impériale. Antoine-François-André Therrin (et non Therin, voire Thorin, comme on peut le lire souvent) n'était pas originaire de la cité thermale, mais de Nancy, où son père, André-Charles, résidant avec son épouse Catherine Verne rue de l'Opéra, était professeur en mérite (sic) de l'université de Nancy, avocat en parlement, et directeur de journal. Né le 15 juin 1778, le jeune Lorrain est entré en service dans l'armée à seulement 16 ans : le 12 mai 1794, après concours public, comme chirurgien de 3e classe à l'armée de Rhin-et-Moselle. Il rejoint ensuite, en l'an III de la République, l'armée du Nord, en l'an IV, l'hopital militaire de Paris, puis, comme chirurgien de 2e classe (germinal an VIII), l'armée de réserve d'Italie. Retour à Paris (an IX), puis affectation, comme chirurgien de 3e classe (brumaire an XI), dans l'artillerie de la Garde. Un corps qu'il servira jusqu'en juillet 1814. Therrin est à Austerlitz, à Ulm. Le 14 mars 1806, alors qu'il est attaché comme chirurgien-major (ancienneté du 23 octobre 1802) à l'artillerie à cheval, il fait son entrée dans l'ordre de la Légion d'honneur. Il sert ensuite en Prusse, en Pologne, en Espagne, en Autriche, et c'est à Wagram – où il aurait été blessé, selon Michaud, mais ni ses états de services, ni Martinien ne le confirment - que Napoléon le fait membre officier de la Légion d'honneur – nomination du 9 juillet 1809. Le chirurgien nancéien, à qui l'illustre Larrey avait confié le soin de panser le colonel Augustin-Marie d'Aboville dont le bras avait été emporté à Wagram, participe à l'expédition de Russie, et la retraite de Moscou ne le laisse pas indemne. C'est d'ailleurs en 1813 que celui qui a été victime du froid est amené à fréquenter le site de Bourbonne. Déjà auteur, alors qu'il est officier de santé à l'hôpital militaire d'instruction de Paris, d'un mémoire sur les propriétés antiseptiques de l'eau de goudron (1798), puis d'un essai sur la nostalgie (1810), sujet qui le fait apparaître, selon un officier, comme un « disciple » de l'illustre Desgenettes, Therrin consacre aussitôt une notice aux eaux thermales de la cité haut-marnaise, où ont séjourné ou séjourneront les généraux Nansouty, Sébastiani, les colonels Delacroix (frère de l'illustre peintre), Hubinet de Soubise... Bourbonne, celui qui a été chirurgien en chef de l'hôpital militaire Montaigne à Paris (décembre 1814), y est afffecté le 3 avril 1816, comme chirurgien en chef de l'hôpital militaire local. Poste qu'il occupera jusqu'en 1841. Vice-président de la Société médicale d'émulation, en 1817, membre de l'Académie nationale de médecine, Therrin aurait été notamment le médecin du duc de Berry (fils du futur roi Charles X et neveu de Louis XVI), jusqu'à son assassinat en 1820. Retraité, cet amoureux des livres, époux de Marie-Elisabeth Coignez (née vers 1797), résidait rue du Haut-de-Craye, à Bourbonne, lorsqu'il y décède le 7 février 1857, dans sa 79e année. Cet ancien chirurgien-principal des armées était titulaire de plusieurs décorations étrangères, notamment de l'Autriche, en raison de son dévouement pour les patients originaires de cet Etat.

mardi 1 octobre 2013

Un major langrois tombé à Waterloo

Deux officiers haut-marnais ont trouvé la mort à Waterloo. Deux officiers supérieurs, d'ailleurs, originaires de l'arrondissement de Langres. Le chef de bataillon (et peut-être lieutenant-colonel) Léon Quilliard, d'Aubepierre-sur-Aube, membre de l'état-major du Ier corps, emporté par une charge de cavalerie britannique. Et le major François Bel, officier de grosse cavalerie. François Le Bel (dit Bel) naît à Langres le 12 octobre 1768. Epoux de Marie-Joseph Demoulin, son père, Jean Le Bel, était alors brigadier au régiment de Conti cavalerie, en séjour dans la cité. Le parrain du nouveau-né est d'ailleurs un fourrier de ce régiment, sa marraine, la femme d'un autre brigadier. A 18 ans, le jeune homme est incorporé dans le régiment de Dauphin dragons, qui deviendra 7e régiment de l'arme. Sa carrière décolle en 1791, lorsqu'il est élu capitaine au 4e bataillon de volontaires du Morbihan. Ce bataillon passe le 1er ventôse an IV dans la 36e demi-brigade. Nous retrouvons le capitaine Bel à la 54e demi-brigade, puis il passe au 9e régiment de dragons, en 1800, puis dans la gendarmerie, en 1801. D'abord en poste à Cahors, puis, en l'an X, à Avignon. En 1806, le Langrois rejoint le 7e régiment de cuirassiers. Il sera promu chef d'escadron au 3e régiment de cuirassiers le 19 août 1812. Chevalier de la Légion d'honneur en 1813, François Bel participe à la défense de la place de Dantzig, où il est fait prisonnier le 1er février 1814, ne rentrant en France qu'en juin, après la première abdication de Napoléon. Mis en demi-solde (juin 1814), il est promu major au 1er régiment de carabiniers (28 mars 1815). Il tombe le 18 juin 1815 lors de la bataille de Waterloo, en même temps que son compatriote, le sous-lieutenant de Hédouville (de Sommermont), est blessé. François Bel était le huitième Haut-Marnais à avoir occupé un grade d'officier supérieur au sein de la grosse cavalerie. L'essentiel des informations de cet article provient de l'inestimable «Dictionnaire des officiers de cuirassiers» signé Olivier Lapray.

dimanche 4 août 2013

Un officier de cavalerie de la Révolution et du Consulat : le chef d'escadron Colin

Antoine-Sébastien Colin est un de ces officiers qui ont cessé leur carrière sous le Consulat, et qui n'ont donc pas conquis quelques « parcelles de gloire » durant les campagnes impériales. Fruit de l'union de Pierre Colin et de Madeleine Marizé, il naît et est baptisé à Montierender (Montier-en-Der) le 9 janvier 1752. Son parrain, Antoine Cardon, est alors commandant de la brigade de la localité. La Révolution permet au Dervois – il a 40 ans - d'être nommé sous-lieutenant, servant, en 1793, au sein du 7e régiment de cavalerie (ex-Royal-Etranger), un corps affecté depuis 1792 à l'armée des Ardennes. Selon l'historique du 7e cuirassiers, le sous-lieutenant Colin est blessé, avec le capitaine Rouget, le 18 mars 1793, lors de la bataille de Neerwinden. Le régiment se bat ensuite avec l'armée de Sambre-et-Meuse à Solesmes, à Menin en 1793, assiège Luxembourg l'année suivante, se bat dans les rangs de l'armée du Danube, puis en Allemagne en 1800. Colin sert alors comme chef d'escadron au sein du 7e de cavalerie (commandé par le chef de brigade Goudeau), mais n'y est plus deux ans plus tard, alors que le 7e de cavalerie va devenir 7e régiment de cuirassiers (commandé par le chef de brigade Offenstein, futur général commandant le département de la Haute-Marne, et comptant parmi ses officiers un lieutenant nommé Colin dit Lamblez, promu en l'an VII). Pensionné pour blessures après 29 ans de services, le chef d'escadron Colin se retire à Montier-en-Der, où il décède le 29 septembre 1821, rue Notre-Dame, à l'âge de 69 ans. Louis-Nicolas Remy Vincent, fils du général, est l'un des citoyens dervois qui déclarent le décès de cet officier de cavalerie méconnu.

vendredi 14 juin 2013

Potey, un Langrois chef de brigade sous la Révolution

Pierre Potey est l'un des officiers supérieurs haut-marnais de la période Révolution – Empire les plus méconnus. Fils d'Antoine, un tixier originaire de Selongey, et de Catherine Danisel, il naît à Langres le 31 juillet 1748 et embrasse la carrière militaire. En 1793, le voilà lieutenant au sein du 43e régiment d'infanterie (ancien Royal Vaisseaux). Le 2e bataillon de ce régiment sert, le 27 mars 1794, à créer la 86e demi-brigade, avec le 19e bataillon de volontaires du Paris et le 3e bataillon de volontaires du Puy-de-Dôme. Potey en est élu chef de brigade, c'est-à-dire colonel, à l'âge de 46 ans. Avec la 86e, le Langrois sert aux armées des Ardennes, de Sambre-et-Meuse, de Moselle, se distinguant au siège de Luxembourg, puis aux armées du Rhin et de Rhin-et-Moselle. Son unité devient 103e demi-brigade, à compter du 20 février 1796, mais Potey y sert très peu. Par décision du conseil des Cinq Cents du 21 floréal an V (mai 1797), il est pensionné, pour infirmités et déclaré hors d'état de servir, après 36 ans de services. Il se retire alors à Langres. La vie de ce chevalier de Saint-Louis sera longue : il décède en effet, à l'âge de 88 ans, à Bourbonne-les-Bains, où il est domicilié, rue du Pont-Bernard, le 13 mai 1836. Il était veuf de Catherine Lecomte.

mardi 28 mai 2013

Dupotet, le marin qui affronta Nelson

C'est dans le village bourguignon de Chaugey, limitrophe de la Haute-Marne, que naît, le 17 décembre 1777 (et est baptisé « par crainte de mort »), Jean, Henry, Joseph Dupotet. Par sa mère, il est à moitié haut-marnais, puisque Jeanne Bégin est née à Colmier-le-Bas, et elle s'est mariée, en 1777, à Villars-Montroyer, avec Henry, Joseph Dupotet, capitaine des gardes du corps du roi, écuyer, originaire de Chaugey. D'ailleurs, le premier enfant du couple a vu le jour à Colmier. Le personnage qui nous intéresse est le deuxième des dix enfants du foyer. Engagé en 1793 dans la marine – il n'a que 16 ans – le jeune homme passe enseigne de vaisseau cinq ans plus tard et participe aux expéditions de Saint-Domingue, échappant miraculeusement à la fièvre jaune. Lieutenant de vaisseau, il devient second du vaisseau Le Redoutable, et c'est avec ce navire, le 21 octobre 1805, qu'il s'illustre lors de la bataille de Trafalgar. Le Bourguignon se lance en effet, au cri de « Vice l'empereur », à l'abordage du Victory, soit le vaisseau accueillant l'amiral Nelson qui trouve la mort lors de la bataille. Le sort est funeste pour les couleurs franco-espagnoles, et Le Redoutable lui-même en est victime : sur un équipage de 645 hommes, seuls survivent 32 hommes, dont Dupotet, blessé et prisonnier. Rentré en France, il est proposé pour la Légion d'honneur par l'amiral Decrès, le ministre de la Marine né à Chaumont, qui se l'est attaché comme aide de camp. Capitaine de frégate, il est capturé en 1810 alors qu'il commande la frégate Le Niemen. Capitaine de vaisseau depuis 1811, Dupotet poursuit sa carrière durant la Restauration, sera grand-officier de la Légion d'honneur, préfet maritime de Brest, gouverneur de la Martinique, vice-amiral, jusqu'à sa retraite en 1845. Il décède le 9 janvier 1852, frappé par l'apoplexie, et est inhumé au cimetière du Père-Lachaise, à Paris. Son frère, Louis, François, sera chef de bataillon. Son oncle Nicolas, capitaine de cavalerie, s'est marié en Haute-Marne (à Latrecey), s'y est installé, à Fays (près de Wassy). Parmi les enfants de celui-ci, Nicolas (1784-1865) et Jean-Nicolas (1789-1877) seront gardes d'honneur, le premier sous-lieutenant de grenadiers de la garde nationale de Haute-Marne durant les Cent-Jours, puis maire de Fays, chevalier de la Légion d'honneur, le second, propriétaire à Fays, tous deux, médaillés de Sainte-Hélène ; un autre, Louis, né en 1771, capturé à Saint-Domingue, ne rentrera en France qu'en 1821, s'installera à Joinville, sera, lui aussi, médaillé de Sainte-Hélène.

mercredi 24 avril 2013

Les six blessures du capitaine Guénard

François-Charles Guénard (de La Tour) naît à Joinville le 13 janvier 1789. Son père, Charles, originaire de Dommartin-le-Franc, sera lieutenant de gendarmerie à Chaumont sous l'Empire. Son oncle, François-Félix, natif de Villiers-aux-Chênes, sera chef de bataillon d'artillerie et épousera la sœur des généraux Lallemand. Comme ces deux parents, François-Charles choisit la carrière militaire. A 17 ans, il intègre l'école spéciale militaire de Fontainebleau, d'où il sort, le 4 mars 1807, comme sous-lieutenant, affecté au 34e régiment d'infanterie de ligne. Le jeune Haut-Marnais se bat dans la péninsule ibérique, et le 8 août 1809, il reçoit, à Puente del Arzobispo, par un éclat d'obus au pied gauche, la première de ses six blessures. Puis un coup de feu l'atteint à la cuisse gauche à Villa-Garcia (11 août 1810). Lieutenant le 1er mai 1811, un coup de baïonnette, lors de la bataille d'Albuhera, le touche encore... à la cuisse gauche. Et lors de l'affaire d'Arroyo de Molinos, au cours de laquelle un de ses compatriotes servant dans le même régiment (le capitaine Jacquot, de Sommancourt) est capturé, il reçoit un coup de feu au côté droit et, à nouveau, un autre à la cuisse gauche ! En mai 1812, Guénard passe, comme lieutenant en second, au 1er régiment de chasseurs à pied de la Garde impériale. Voici 200 ans, le 8 avril 1813, il est promu capitaine au 9e voltigeurs de la Garde, dont il commande la 3e compagnie du 1er bataillon, reçoit une nouvelle blessure à Lutzen, avant d'être fait membre de la Légion d'honneur le 17 mai 1813. On le proposera pour le grade d'officier dans cet ordre le 2 avril 1814... mais ne sera décoré qu'en 1853, le même jour que le Chaumontais Joseph-Justin de Montangon. La Restauration l'autorise à servir, comme capitaine, au 38e de ligne, mais l'homme n'hésitera pas à se rallier à Napoléon durant les Cent-Jours, au sein du 5e voltigeurs de la Garde. Un revirement qui ne l'empêchera pas ensuite de rejoindre, en février 1816, la Légion de la Haute-Marne, en qualité de capitaine de voltigeurs. Chevalier de Saint-Louis en 1826, la suite de sa carrière sera industrielle. C'est ainsi qu'il est autorisé, en 1836, à établir un haut-fourneau sur le Rongeant, à Joinville. Epoux, depuis 1820, de la fille du colonel d'artillerie Le Masson du Chesnoy, il vit à Saucourt-sur-Rognon, près de Doulaincourt, en qualité de maître de forges (il est alors membre du conseil d'arrondissement de Wassy), lorsqu'il reçoit la médaille de Sainte-Hélène. Il décède dans ce village le 9 mai 1858, à l'âge de 69 ans. Sa sépulture y est toujours visible.

dimanche 3 mars 2013

Lejoyand, un cinquième officier d'artillerie né à Fresnes

Que nombre d'officiers d'artillerie soient nés à La Fère, à Auxonne ou à Toul ne saurait surprendre : ces petites villes sont attachées à l'histoire de cette arme. Il est donc logique que la présence de régiments dans ces localités ait suscité des vocations, soit parmi les familles de ces militaires, soit parmi la population. Mais que cinq officiers artilleurs du Premier Empire aient vu le jour dans un village de vignerons, Fresnes-sur-Apance, près de Bourbonne-les-Bains, ne laisse pas d'étonner. D'autant que quatre d'entre eux étaient officiers supérieurs dans l'artillerie impériale ! Car le dossier très succinct de membre de la Légion d'honneur concernant Antoine, Nicolas Lejoyand fait erreur. Ce n'est pas à Fresnes-Saint-Mammès, en Haute-Saône, qu'il a poussé son premier cri, mais bien dans le village haut-marnais. Il est le fils de Claude-Antoine Joyand (sic), docteur en médecine originaire de Jussey (Haute-Saône), époux d'Anne-Marguerite Craplet. Né et baptisé le 9 avril 1782, Antoine-Nicolas a pour parrain Nicolas Michaux, avocat en parlement. Le jeune homme entre en service comme élève de l'Ecole polytechnique. Il est de la promotion de l'an X, aux côtés du Langrois Elie-Constant Daguin, du futur commandant du génie Léon Quilliard (d'Aubepierre) ou encore du Meusien Morlaincourt. Lejoyand est promu lieutenant le 1er vendémiaire an XII (24 septembre 1803) puis capitaine le 31 août 1809. Deux ans plus tard, il est situé comme capitaine en second du 5e régiment d'artillerie à cheval à Besançon, tout comme le Franc-Comtois Charles Richardot (qui commandera l'artillerie à Langres sous la Restauration). Lejoyand fait son entrée dans l'ordre de la Légion d'honneur le 5 septembre 1813. Il semble être alors capitaine en premier au 6e régiment d'artillerie à cheval. Puis il est promu chef de bataillon le 8 janvier 1814, à moins de 32 ans. Durant la Première Restauration, il est officier supérieur à la suite, commandant l'artillerie de son département natal. Inspecteur des forges d'artillerie de l'arrondissement du Doubs, en 1820, il est promu lieutenant-colonel en 1825, sert au 6e régiment d'artillerie à pied à Douai, puis, officier de la Légion d'honneur, il est adjoint au commandant de l'école de Metz. Le lieutenant-colonel Lejoyand, chevalier de Saint-Louis, décède à Vesoul (Haute-Saône) le 18 décembre 1867. Il était le neveu de Claude-François Lejoyand, ancien administrateur-général des hôpitaux militaires, né à Jussey.

mardi 5 février 2013

Deux généraux autrichiens... nés en Haute-Marne

Non, le général autrichien Ferdinand, Pierre de Fresnel n'a pas vu le jour en 1762, à Curel en Picardie, comme l'écrit par erreur, dès 1857, l'historien autrichien Jaromir Hirtenfeld. Il est bien né dans un village nommé Curel, mais celui-ci se situe en Haute-Marne (canton de Chevillon), et non pas en 1762, mais le 15 août 1761 (huit ans jour pour jour avant Napoléon), comme en témoigne son acte de naissance. Le fils de Nicolas, François de Hennequin, comte de Fresnel, Curel et autres lieux, baron du Saint-Empire, et de Marie-Charlotte du Coin, est donc un citoyen haut-marnais lorsqu'il entre, en 1793, au service des ennemis de la Révolution. Selon Hirtenfeld, lui qui servait au Royal-Saxe parmi les émigrés devient cinq ans plus tard colonel du 13e dragons autrichien, est promu au grade de general-major à 28 ans, se bat à Hohenlinden (1800), et commande une brigade en 1805 (il semble être fait prisonnier lors de cette campagne). Le Haut-Marnais se bat ensuite à Wagram, à la tête d'une division du Ier corps, et reçoit même, après la blessure du général de Wrède, le commandement de l'armée austro-bavaroise défaite à Hanau (1813). Le feld-maréchal-lieutenant Fresnel, commandant la 2e division du IIIe corps (Giulay) de l'armée de Bohême, se battra encore en France l'année suivante, luttant même dans son département natal... à Laferté-sur-Aube, fin février. Il décède le 25 février 1831 à Lemberg (aujourd'hui Lviv en Ukraine). Fresnel n'est pas le seul Haut-Marnais à servir l'Autriche. C'est le cas également d'Auguste, François, Marcel de Ségur-Cabanac, né le 12 janvier 1771 à Leschères (aujourd'hui Leschères-sur-le-Blaiseron), près de Joinville, fils de Nicolas, comte de Ségur-Cabanac, seigneur de Leschères et Arnoncourt, chevalier de Saint-Louis, capitaine de grenadiers du roi, et de Louise d'Allonville. Ségur-Cabanac, parent de plusieurs futurs dignitaires de l'Empire français, intègre à 9 ans l'école de Brienne, où il côtoie un certain Napoléon Bonaparte. Militaire au service de Louis XVI, il émigre en 1791. Lui dont trois parents meurent pour le roi (son beau-frère Dampierre, tombé lors de la fuite du souverain à Varennes, ses oncles d'Allonville, l'un tué le 10 août 1792, l'autre en 1793) sert dans les gardes du corps du comte d'Artois, participe à la défense de Maastricht, aux combats près de Valenciennes, avant de rejoindre comme cadet le régiment d'infanterie du Prince de Ligne. Capitaine, il est aide de camp de ce prince jusqu'à sa démission en 1802. On le retrouve major, sept ans plus tard, commandant un bataillon de la Landwehr, prenant part à la bataille de Wagram. Domicilié à Wischau, en Moravie, il reçoit en 1813, de la part de Napoléon (gendre de l'empereur d'Autriche), des lettres patentes l'autorisant à devenir sujet autrichien. Conservant toutefois la nationalité française, Ségur-Cabanac poursuivra sa carrière, devenant general-major, conseiller intime et préfet de la chambre de l'empereur d'Autriche, à son décès à Vienne en 1847. Le Haut-Marnais est à l'origine d'une branche autrichienne dont un représentant a commandé récemment les troupes autrichiennes en Afghanistan. A noter que le general-major de Ségur-Cabanac était l'oncle d'un officier des armées napoléoniennes, le chef de bataillon Louis-Edouard de Beaufort, futur député et président du Conseil général de la Haute-Marne, blessé en Russie dans les rangs du 12e de ligne.

mercredi 2 janvier 2013

Le capitaine Lebel et son épouse milanaise

En 1811, le 6e régiment d'artillerie à pied, commandé par le colonel Camas, avait son dépôt à Rennes, dans l'Ille-et-Vilaine. Dans ses rangs, parmi les 98 officiers qui lui étaient affectés, servaient alors cinq Haut-Marnais. Deux lieutenants en second : Jean Bourlier, de Corgirnon, qui se distinguera en juin lors de la défense de Niebla, en Espagne, et Pierre-Louis Romain, de Saint-Dizier. Et trois capitaines en premier : Jean-Baptiste Bourgoin, de Courcelles-sur-Blaise (canton de Wassy), Brice Fenouillot, de Valleroy (canton de Fayl-Billot) et Henry Lebel, qui nous intéresse ici. Fils de Louis Le Bel (sic), greffier du bailliage de Reynel, Henry voit le jour le 24 octobre 1758 à Leurville (canton de Saint-Blin). Il a 21 ans lorsqu'il s'enrôle dans le corps de l'artillerie, ayant pour officier un nommé de Rougeot. Mais pour ce faire, et pour une raison qui nous échappe, il prend l'identité de son frère Etienne, de deux ans son cadet – ainsi que sa femme viendra l'attester à Chaumont, en 1825. En avril 1795 (20 germinal an III), Lebel est promu lieutenant, puis passe capitaine en mai 1803 (7 prairial an XI). Entretemps, il a pris pour épouse, le 13 mai 1801, une Milanaise, Cansianilla Bergomi (de Meggio, précisément), fille d'Antoine-Joseph et de Thérèse Capra, veuve de Dominique Corti. Capitaine de 2e classe au 6e régiment d'artillerie à cheval, sous le Consulat, Lebel est donc capitaine-commandant au 6e régiment d'artillerie à pied, en 1811. Il cesse de servir le 16 mai 1812, à l'âge de 54 ans, et, capitaine retraité, il se retire à Reynel. Domicilié rue de l'Eglise, il décède durant la Première Restauration, le 1er avril 1815 (un mois jour pour jour après le débarquement de Napoléon dans le Golfe-Juan). Sa veuve lui survivra longtemps. Très longtemps. Remariée avec un sieur Brunel, elle décède en effet, rentière, à Reynel, le 24 avril 1861. A 84 ans, selon l'acte de décès consigné par l'état civil. A 94, si l'on se fie au bulletin des lois de 1841, qui lui accorde une pension.