A 25 ans, Nicolas-Marie Guyardin est, déjà, officier supérieur. Une belle carrière se profile donc encore pour ce jeune homme, usuellement prénommé Félix, né à Langres le 12 octobre 1787. Sauf que les Bourbon qui lui ont donné la croix de Saint-Louis ne lui pardonneront jamais son ralliement à l’Usurpateur durant les Cent-Jours…
Comme le Chaumontais Laloy, comme les frères bourbonnais Chaudron-Rousseau, Guyardin est un fils de « régicide » – surnom de ces députés qui ont voté la mort du roi Louis XVI – qui a choisi le métier des armes. En février 1804, il intègre la jeune école spéciale militaire de Fontainebleau, dont il sort pour être nommé sous-lieutenant le 14 septembre 1805 et affecté au 103e de ligne. Un corps commandé par le colonel Taupin qui se bat à Iéna (le nom figure sur son drapeau), en Espagne. En 1809, Guyardin est déjà passé lieutenant (le 22 décembre 1806), au sein du 103e désormais commandé par un Haut-Marnais, le Wasseyen Rignoux.
Il est promu capitaine le 11 juillet 1810, puis chef de bataillon, le 1er mai 1813, au 43e de ligne, avant de rejoindre un mois plus tard l'état-major général. Ayant servi de 1809 à 1812 dans la péninsule, il prend part à la Campagne de Saxe et est fait chevalier de la Légion d'honneur le 19 novembre 1813. Si l’on s’en réfère aux travaux de Martinien, il n’est pas blessé durant les campagnes impériales.
Il est qualifié de chef d’escadron lorsqu’il est fait chevalier de Saint-Louis, le 16 janvier 1815. « Il feignait (sic) alors du dévouement pour les Bourbons, écrira plus tard le préfet de la Haute-Marne. Mais il s'est démenti avec tant d'éclat en 1815 et a montré une haine si violente qu'il ne saurait en revenir. » Traduction : le Langrois s’est rallié à Napoléon. Officier d’état-major, c’est lui qui porte un fameux ordre du maréchal Soult, major-général de l’armée du Nord (engagée en Belgique), destiné au général Vandamme, commandant du 3e corps, le 16 juin 1815. Le lendemain, si l’on s’en réfère aux travaux de Pierre de Wit sur la campagne de Belgique, il est officiellement présenté comme le sous chef de l’état-major de ce même corps, en lieu et place de l’adjudant-commandant Trezel, qui vient d’être blessé à Ligny. Un 3e corps qui ne se bat pas à Waterloo mais qui suit le destin des troupes placées sous les ordres du maréchal de Grouchy.
Le retour des Bourbon sur le trône de France signifie la fin de la carrière de Guyardin. Fin 1815, il est qualifié de chef de bataillon d’état-major en demi-solde, retiré à Choilley, près de Prauthoy, berceau des Guyardin (tandis que son père, forcé à l’exil, a dû s’établir en Suisse, accompagné de son épouse et d’une fille). Il y est notamment présent en 1818 lors du mariage d’un ami, le capitaine Couroux.
Mais le nouveau régime, servi par ceux là-mêmes qui ont été mis en place par le précédent (Napoléon), veille. Voici ce que le sous-préfet de Langres écrit en 1821 au préfet à propos des voyages des demi-solde de son arrondissement (il y en a 76, sur 100 officiers en demi-solde ou en non-activité). « Quel que soient au fond leurs sentiments, ils n'en manifestent pas de coupables... Il en est un qui fait notoirement exception. Je suis forcé de le nommer. C'est M. Guyardin, chef de bataillon en non activité. Sa résidence est à Choilley. Il n'y est jamais. Il se trouve dans tous les lieux où la légitimité est menacée. On a de lui l'opinion qu'il est agent, et c'en est un très actif, du Comité directeur (sic)..." Quelques jours plus tard, le préfet n'hésite pas à signaler le cas Guyardin au maréchal Victor, qui vient d'être nommé commandant des 6e, 7e, 18e et 19e divisions : « Cet officier, fils d'un régicide, avait reçu pendant la Première Restauration la croix de Saint-Louis et, je crois, celle d'officier de la Légion d'honneur… Mais je crains beaucoup que les menées secrettes (sic) ne soient pas moins hostiles que les discours. Quoique fort peu riche, il voyage sans cesse. Il était à Paris le premier jour de juin (1820). On le connaît à Lyon, à Grenoble et dans le Piémont... On ne peut pas douter qu'il ne soit l'agent d'une faction. Je l'ai, depuis longtemps, signalé à M. le directeur général de la Police ».Guyardin a-t-il été poursuivi pour ces « menées secrètes » ? Nous l’ignorons. Selon son dossier de la Légion d'honneur, il meurt le 10 mars 1827, à 40 ans, sans héritier (si ce n'est sa soeur, qui réside à Sens). Nous n'avions pas retrouvé son lieu de décès, jusqu'à ce que récemment, Mme Marie-Claude Finot, qui a étudié les familles de Choilley et Dardenay, nous apporte la réponse. L'officier, nous écrit-elle, est décédé "en la maison de santé des docteurs, rue du Bois à Vanves en laquelle il s'était retiré pour cause de maladie. Quelques années auparavant, lui et sa soeur (mariée au capitaine Hérard) avaient vendu aux communes de Choilley et de Dardenay la maison héritée de leur père. Ladite maison est devenue ainsi le presbytère du village (pendant presque un siècle et demi)".
Autre question : l’officier a-t-il été promu, ne serait-ce que provisoirement, lieutenant-colonel durant les Cent-Jours ? Nous pouvons le penser. Il est en effet invariablement présenté comme chef de bataillon ou lieutenant-colonel dans les travaux de Pierre de Wit, et c’est avec second grade qu’il apparaît lors du mariage du capitaine Couroux (ancêtre du sénateur Charles Guené).
A noter que son frère aîné, Emile, Polytechnicien, lieutenant d'artillerie, a été tué en Espagne.
mardi 6 octobre 2009
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