«Je
suis né le 13 du mois de février 1773, dans le village nommé
Autreville, à deux lieues de Chaumont en Bassigny, chef-lieu du
département de la Haute-Marne. Je suis fils légitime de Nicolas
Fricasse, jardinier, et d'Anne Corniot, de la dite paroisse.» Ainsi
commence le journal de marche du sergent Jacques Fricasse, «publié
pour la première fois par Lorédan Larchey d'après le manuscrit
original» en 1882.
Il
s'agit du plus célèbre témoignage provenant d'un volontaire de la
République, à tel point que des manuels scolaires en reproduiront
des extraits. Grâce à ce récit, le parcours militaire de Jacques
Fricasse, entre 1792 et 1800, est bien connu. Il n'en est pas de même
pour sa vie civile. Lorédan Larchey, qui tenait ce journal de Jules de
Forge, de Vesoul, ne souffle mot de son destin dans son propos
introductif. C'est cet aspect que nous aborderons ici.
Le
berceau paternel du soldat se situe dans les Vosges. Le grand-père, Claude
Fricasse (ou Frigasse), était domicilié à Jubainville, près de
Neufchâteau. Le père, Nicolas, exerçait la profession de jardinier
à Autreville-sur-la-Renne, et c'est dans ce village, le 9 avril
1771, qu'il a pris pour épouse Anne Cornuot, fille d'un vigneron.
Jacques est leur deuxième enfant. Une fille, Jeanne (mariée en 1796 à Longchamp-sur-Aujon avec Charles Choquet), est née en effet à
Autreville le 3 février 1772. Un autre fils, Jean, verra le jour
dans ce village le 24 mars 1775 à Autreville, puis deux garçons à
Juzennecourt, en 1776 et 1778.
En
effet, alors que Jacques est très jeune, Nicolas Fricasse part
travailler comme jardinier auprès du seigneur de Juzennecourt.
«C'est dans cet endroit que j'ai été élevé et que mes parents
m'ont appris à connaître ce que devait savoir un honnête homme»,
écrira le futur sous-officier. Puis le père s'en va cultiver les
jardins des Bernardins de Clairvaux, où son fils s'instruit.
Lorsque
la Révolution éclate, Jacques, qui n'a que 16 ans, est au service
du marquis de Messey, officier seigneur de Braux-le-Châtel, puis à celui de Quilliard, commandant la garde
nationale du canton de Châteauvillain (devenu Ville-sur-Aujon).
C'est à l'appel de celui-ci qu'il se porte volontaire en août 1792
pour rejoindre le Bataillon Biron, 3e bataillon de
volontaires nationaux de la Haute-Marne. Durant le séjour de l'unité
dans la région de Wassy où elle s'organise, Fricasse est nommé
caporal au sein de la 6e compagnie du capitaine Lemoine.
Le 12 avril 1793, tous font mouvement pour Metz puis l'armée du
Nord. Ainsi commence sa période militaire...
Devenu
sergent dans la 3e demi-brigade d'infanterie de ligne
(après être passé par la 127e), le Haut-Marnais ne
reverra sa Champagne natale qu'en 1799 ! Il venait d'être blessé
d'une balle à l'avant-bras gauche lors de la bataille de Lecco, en
Italie. Entre-temps, sa famille s'est installée à
Longchamp-sur-Aujon, premier village aubois après la Haute-Marne, et
lorsque le sous-officier reprend le chemin du retour vers son
régiment, le 7 novembre 1799 (après avoir assuré l'instruction de
conscrits haut-marnais à Chaumont), c'est accompagné de son frère
Jean. Celui-ci «avait quitté le 9e
chasseurs à cheval, pour venir prendre du service dans la 3e
demi-brigade de ligne qui était en ce moment en Italie.» Mesurant
1,76 m, le cadet sera en effet incorporé dans la 3e
demi-brigade d'infanterie de ligne le 22 décembre 1799 (il sera versé au 25e régiment par ordre du ministre de la Guerre en 1811).
Le
sergent Fricasse ne restera pas longtemps sous l'uniforme. Le 27
septembre 1800, il est renvoyé dans ses foyers, et revient à
Longchamp-sur-Aujon le 20 octobre. Il s'y établit comme jardinier.
Le
10 avril 1801, Jacques Fricasse se marie avec Anne Loillet, née à
Ville-sous-La-Ferté, demeurant à Outre-Aube. Quelques jours plus
tard, le 7 mai, sa mère Anne Cornuot décède à Longchamp.
L'ancien sous-officier deviendra garde forestier, à Longchamp, puis, veuf, domicilié à la
ferme d'Outre-Aube, il se remariera le 11 janvier 1813 à Maranville,
en Haute-Marne, avec Edmée Jeudy, de quatorze ans sa cadette.
Ensuite,
son métier l'amène à Baroville, près de Bayel, et c'est dans ce
village qu'il décède le 23 mai 1833, à l'âge de 60 ans. Il ne semble pas avoir eu de descendance.
Sources : Journal de marche du sergent Jacques Fricasse ; registres paroissiaux et d'état civil de la Haute-Marne et de l'Aube.
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