Nous commençons aujourd’hui à mettre en ligne des documents relatifs à la Campagne de France en Haute-Marne. Inauguration avec un témoignage méconnu d’un dragon ayant assisté au combat du 26 mars 1814 à Saint-Dizier, et curieusement natif de la région bragarde : Louis-Antoine Gougeat, né à Larzicourt (au bord du lac du Der) en 1788, engagé en 1806 au 20e dragons, et alors cavalier d’ordonnance du capitaine de Marcy. Un témoignage publié dans les carnets de la Sabretache en 1901.
Au 26 mars 1814, le 20e dragons, commandé par le colonel Desargus, appartient à la division Lhéritier du 5e corps de cavalerie. Martinien indique que ce régiment a déploré ce jour-là trois officiers blessés, dont le chef d’escadron Algay et le lieutenant Lallemand.
« Nous partons, le lendemain, par la route de Montierender, nous arrivons au pied du village de Moelain (Note : Moeslains), au-dessous et loin de Saint-Dizier. Ce village est situé au sommet d’une petite côte de vignes au bas de laquelle coule la Marne. De l’autre côté est le bourg d’Hoericourt, avec une vaste plaine. Il est 10 h du matin, le temps est splendide, le soleil brille d’un vif éclat. L’armée russe évolue dans la plaine. A la vue de l’ennemi, notre armée, guidée par des habitants du pays, traverse la Marne au gué d’Hoericourt, en masse et dans un ordre parfait. Parvenue sur l’autre rive, elle est accueillie par la cavalerie russe dont elle reçoit le choc sans broncher, notre cavalerie la charge à son tour ; une terrible mêlée s’engage pendant laquelle les escadrons ennemis sont ramenés plusieurs fois. Enfin, après deux heures de rude combat, l’Empereur lance sur les Russes la cavalerie de la Garde qui les sabre et les met dans une déroute complète. Ils se débandent et fuient au galop une partie dans la direction de Vitry et le reste par la route de Bar-le-Duc. Je ne pris pas part à l’action, mais je la vis se dérouler à mes pieds, du haut de la petite colline de Moelain, où je me trouvais avec l’officier payeur du régiment. La traversée de la Marne par notre cavalerie, dont les chevaux ne nous paraissaient pas plus gros que des moutons au milieu de la rivière, et le choc des escadrons dans la plaine d’Hoericourt aux rayons d’un beau soleil qui faisait jaillir des milliers d’étincelles des armes et des casques, constituaient l’un des plus beaux spectacles qu’il m’ait été donné de contempler. Passant, le soir, sur le champ de bataille, je reconnais, parmi les morts, plusieurs dragons de mon régiment et un officier du 19e dragons (Note : Martinien ne mentionne pas d’officier du 19e mort ce jour-là, mais trois blessés, dont le chef d’escadron Cosnard et le sous-lieutenant Paradis). Je rencontre M. Lallement, officier dans ma compagnie, blessé à l’épaule, et qui me prie de panser sa blessure. Tout près de la grande route se tiennent des cavaliers qui offrent, mais sans succès, de vendre à leurs officiers des chevaux qu’ils ont pris à l’ennemi. »
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